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paris en bouteille roman feel-good adultes broché et e-book

 Léonie se bat contre le traumatisme d’une violente agression. Eliott recolle les morceaux d’une vie que ses parents ont détruite.

 Et si, au bout de leurs combats, le bonheur était possible ? Si la grisaille parisienne laissait place à une ville de lumière ?

 —  Avec des « si », Eliott, on mettrait Paris en bouteille...

 — Je relève le défi. On ne va pas juste s’en sortir : on va triompher.

 Une seule rencontre peut tout transformer. Le pari qui les lie est déjà une promesse.

Roman feel-good - 16 à 160 ans

Autoédition 2021 - 15€

Disponible en e-book

Un énorme coup de cœur !

 

Que ce soit l’intrigue, les personnages, les bouleversements, les rebondissements, la fin ou cette magnifique plume, tout était absolument parfait.

 

Quel bonheur de l’avoir lu, je suis vraiment amoureuse de cette pépite !

La biblio de Mogo

Un roman époustouflant !

 

La plume de Margot de Jubécourt est d'une justesse palpable. Elle offre des dialogues réalistes, qui prennent leur temps sans verser dans le mièvre ou l'insensible.

 

Un appel à la lumière et à l'espoir... Quelle prouesse ! Et quel cadeau pour nous, lecteurs !

Charlène Gros-Piron - L'Eden des Rêves

PARIS EN BOUTEILLE

"Être parisien, ce n'est pas être né à Paris. C'est y renaître."
Sacha Guitry

1.
Les pas perdus

 Le ciel dépose ses nuages sur l’horizon en imposantes volutes noires. Le soleil décline sur les champs de colza, soulignant les ombres de sa lumière jaune. Les arbres se désarticulent sous des rafales soudaines, puis s’immobilisent, branches pendantes, prêts à se laisser emporter à nouveau dans la tourmente. Le monde s’obscurcit à vue d’œil. Le plafond menaçant descend comme un couvercle, pesant sur la terre jusqu’à la faire suer d’une humidité oppressante, trop chaude pour cette fin d’hiver.

 Léonie allonge le pas. Ses bottines noires foulent la terre, si sèche qu’elle en est craquelée. Sous son poids, les cailloux écorchent la carapace dure. La jeune femme garde la tête baissée, comme pour se dérober à cette colère inévitable. Surtout, ne pas regarder le malheur dans les yeux. Surtout, garder l’esprit rivé au sol, à ce mouvement imperturbable du pas qui érafle le chemin. Léonie fixe ses jambes l’une après l’autre, de longues jambes fines vêtues d’un jean noir. Leur mouvement trace une danse abrutissante.

 Elle trébuche sur une pierre, se rattrape aussitôt. Elle se serre dans sa fine doudoune rouge, croise les bras pour mieux se protéger, baisse à nouveau la tête. Ce n’est pas le vent qui lui fait peur, ni l’orage. La menace est plus sournoise ; elle vient de l’intérieur. Voilà que son esprit vient d’ouvrir un pan de rideau vers les fenêtres du passé. Ce n’est plus qu’une question de temps, maintenant, pour que tout resurgisse.

 La jeune femme se concentre sur sa respiration. Elle compte ses pas, les rythme à bonne allure. C’est tout juste si elle ne supplie pas le chemin de dérouler son tapis plus vite sous ses pieds. Elle ne veut pas y penser – y penser, c’est déjà faiblir – mais la réalité s’impose comme toujours : elle déteste s’attarder seule dans les endroits peu fréquentés. Dans ces moments, elle n’a qu’un souvenir en tête… un souvenir qu’elle repousse, et repousse encore…

 Léonie lève le menton en constatant que le mouvement de la marche ne suffit plus à l’hypnotiser. Elle essaie de perdre son regard dans le décor, de se noyer dans l’éclair qui fend brusquement le ciel en deux, de s’assourdir au grondement du tonnerre. Les nuages semblent reculer vers l’horizon, comme un film qu’on passe à l’envers. La jeune femme ralentit malgré elle, happée par cette impression. Les secondes défilent, le temps s’allonge… C’est une fascination incontrôlable, paralysante, malsaine. Léonie ne le comprend qu’au moment où un deuxième éclair foudroie le champ de colza. La lumière brusque, aveuglante, lui renvoie son passé en une grande claque.

 

 Soudain, le garage souterrain est là, tout autour d’elle. Léonie ferme sa portière. Le bruit résonne dans le hall immense et sombre. Elle fait quelques pas, ses escarpins claquent contre le sol. Elle se perche rarement sur des talons, mais elle a fait un effort pour son entretien. Elle presse un bouton sur sa clé, les phares de la voiture clignotent et un petit sifflement indique que les portes sont verrouillées. Elle ajuste son sac à main sur l’épaule. Elle se recoiffe, vérifie sa montre. Quinze heures dix. Elle est en avance. Elle sort quand même du parking pour goûter le soleil d’avril.

 — Salut ! T’aurais du feu ?

 Léonie sursaute. Dans ce calme absolu, l’interpellation lui a causé une décharge au cœur. C’est drôle : elle n’a croisé personne dans le parking. À croire que les gens dorment, avec ce soleil. Elle regarde l’homme qui lui a parlé, un type sale, maigre, qui flotte dans son survêtement.

 — Non, désolée.

 Il s’approche et plaque une main sur la hanche de Léonie, qui le repousse aussitôt avec un cri de colère.

 — Oh ! Qu’est-ce que tu fais, là ?

 Il paraît avoir quinze et soixante ans en même temps ; il a les traits creusés, les yeux figés, un sweat à la couleur et à l’odeur du shit. Il empeste. Il empeste vraiment, la sueur, l’alcool, le cannabis. Il a un instant d’hébètement alors que Léonie recule loin de lui.

 Puis le temps s’accélère en trombe, jusqu’à l’emballement. L’homme attrape Léonie par le poignet, d’une main vigoureuse qui lui écrase l’articulation. Il la secoue, elle perd l’équilibre sur ses talons, se tord la cheville. Rien de grave, mais le mouvement la déstabilise, et déjà il bondit sur elle. Il la plaque contre le mur, lui appuie l’avant-bras sur la gorge, lui crache au visage.

 — Je cherchais juste du feu. Je te fouillais pour vérifier. Mais puisque tu fais ta petite prude…

 Il a la voix rauque, saccadée, le menton crispé par la rage. Sa force est stupéfiante, et Léonie suffoque sous la pression qu’il lui applique à la gorge, cubitus contre trachée. Elle ne peut pas bouger, pas parler, rien faire sinon accueillir la terreur qui la saisit.

 — C’est ça que tu cherchais, hein ? T’aimes le contact, on dirait…

 L’esprit détaché du corps, crucifiée par un regard de mépris, Léonie reste clouée au mur quand il la laisse enfin respirer. Ses jambes l’abandonnent comme le reste alors qu’il lui relève sa robe et qu’il glisse la main le long de sa cuisse.

 — Le pire, murmure-t-il avec un rictus, c’est que tu vas devoir vivre avec ça.

 

 Quand la foudre tombe pour la troisième fois derrière le champ de colza, la lumière blafarde dessine une ombre mouvante : celle de Léonie qui court sur le chemin, à la lisière du bois. Les cheveux affolés de la jeune femme s'emmêlent dans la brise. Ses jambes se lèvent en grandes foulées. Sa respiration siffle, son souffle s’enflamme, ses oreilles bourdonnent, le sang cogne sur ses tempes… De temps en temps, sa vision se trouble, mais elle ne ralentit pas. Léonie s’engage à toute vitesse sur la route qui mène chez ses parents. Elle évite de justesse une voiture qui la klaxonne pendant dix secondes. Elle poursuit, comme une boule de feu que rien n’arrête, tourne à droite dans un lotissement, franchit le troisième portail et s’écrase en masse contre la porte fermée. D’une main tremblante, elle retire les clés de sa poche et ouvre la porte.

 Le plus odieux, ce n’est pas l’enchaînement cauchemardesque d’images, de sons, de douleurs. Le pire, c’est ce mal-être terrassant, ce poignard dans le ventre qui fouille les entrailles jusqu’à la nausée. Rien n’aurait pu faire plus de mal à Léonie, et cet homme le savait avec une certitude terrible.

 Elle ferme le verrou derrière elle, et se réfugie dans sa chambre à l’étage. Haletante, elle tourne plusieurs fois en rond dans la pièce, finit par appuyer les mains contre le bureau pour reprendre ses esprits. Elle ferme les yeux, s’efforce de réguler sa respiration et de se calmer. Les larmes sont presque douces après ce coup de panique. Elle se détache du bureau, touche sa commode pour reprendre l’équilibre, avise le maillot de bébé qui est posé dessus. Elle prend dans ses mains cette pièce délicate, et les larmes d’effroi laissent place aux sanglots du deuil.

Détails PEB
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